UN couple aimant arrivé quelques années auparavant. les rêves plein la tête, puis un bébé dans les bras. ça n'a pas toujours été facile, concilier travail et famille, ils ont fait comme ils ont pu. et il le sait, yohan. se souvient vaguement des soirées où ils n'étaient encore que trois, les murmures soufflés derrière les murs trop fins. l'inquiétude qu'ils essayaient de camoufler derrière des sourires rassurants. DEUX enfant tranquille, n'a suffit que d'une connerie pour ne plus jamais en commettre une autre -sauf jeter son existence par la fenêtre, mid-20s crisis visiblement-, trop mortifié par l'état de sa mère lorsque l'administration de l'école avait appelé parce qu'il s'était bagarré avec un autre gamin. si la cause lui échappe aujourd'hui, la honte est restée présente. puis les jumelles sont nées, vient avec elles l'envie d'être le grand frère parfait. aider, parce qu'à cinq, les choses se compliquent. TROIS résolution d'enfant qui ne s'est pas étiolée malgré l'adolescence, écarts évités, fait ce qu'on attend de lui. ne vivait pas entièrement pour lui-même. le choix de carrière choisi pour faire plaisir, les croquis et les portraits délaissés pour se concentrer sur les études qui ne plaisent pas. hyojoo et hyori grandissent elles aussi, se reposent sur lui. ne peut pas faillir. n'en a pas le droit. QUATRE emily. rayon de soleil dans son quotidien plus morne qu'il n'oserait l'admettre. rencontre fortuite au bar où il travaillait à mi-temps. soirée tranquille, début de semaine. numéro qu'elle lui glisse après l'une de leurs multiples conversations, quand elle vient récupérer les cocktails de son groupe. le dopey smile scotché à ses lèvres ne le quitte plus pendant des jours. CINQ le diplôme en poche, l'avenir tracé. sûr. se sent pourtant vide, yohan. tente malgré tout de vivre son 9 to 5 dans une compagnie prestigieuse, métro boulot dodo, garde le sourire qui n'atteint pas ses yeux en place. quand il rentre, c'est la même rengaine. constate, avec du recul, qu'emily l'avait évidemment remarqué. elle avait réussi à pallier au quotidien qui n'allait pas, et il s'était conforté dans la sécurité offerte, affection bien réelle. s'est fait le voeu de plancher sur lui-même, ne pas la laisser seule dans ses efforts. les choses se sont améliorées, un temps. ce n'était peut-être pas un travail de passion, mais les factures étaient payées, ses parents pouvaient se féliciter de sa réussite. donne un coup de pouce, yohan, toujours. SIX ça n'avait pas duré. pression qui grimpe, grimpe et grimpe encore. décision impulsive qui le pousse à vider leur appartement. profite que son nom ne soit pas sur le bail, yohan, file en n'emportant que quelques vêtements, son ordinateur portable et son téléphone. il s'est efforcé d'étouffer les remords qui se nichent au creux de ses tripes, mains serrées sur le volant pendant que la voiture avale l'asphalte et les kilomètres, l'éloignent de san francisco et tout ce qu'il connaissait jusque-là. SEPT mariposa est un drôle de hasard. un panneau aperçu du coin de l'oeil, alors qu'il note que c'est le temps de faire le plein d'essence. n'avait jamais eu de réelle destination en tête, s'était aventuré dans les états voisins au fil des semaines, ses pas le ramenant malgré tout vers la californie. l'envie de revenir et assumer ses conneries se fracassant à la honte. la petite ville et son charme unique le captive. puis, dormir dans un vrai lit après avoir campé sur la banquette arrière de sa voiture lui apparaît comme un cadeau du ciel, le môtel, un vrai palai. une nuit devient deux. puis trois. pour cinq. ses économies fondent. se trouve un travail. c'est une évidence. HUIT les mois s'écoulent, s'adapte à son nouveau train de vie. les mauvais souvenirs enfermés dans un recoin de son esprit, bien déterminé à outrun son karma.


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MISC. la vision éclatée, porte des lunettes ou des verres de contact pour y voir quelque chose ; a renoué avec ses vieilles passions ; pigments, pinceaux, toiles, crayons, marqueurs, cahiers ; l'art qui lui coule enfin du bout des doigts ; il n'est pas rare de trouver quelques taches de peinture ici et là sur ses vêtements ; l'aquarelle est son medium favori, mais il verse aussi dans le dessin et la photo ; sujets variés ; le paysage, les gens ; petites scènes du quotidien illustrées ou capturées avec le plus grand soin ; gribouille tout et n'importe quoi, n'importe où. serviette de table, coin de cahier de notes, ses mains parfois ; donne un coup de pouce à richie pour la comptabilité du paradisco ; la nature, la vraie, remplace la jungle de béton ; découvre des bestioles plus horrifiantes les unes que les autres ; adore ; un trek dans le yosemite national park trouve toujours sa place dans son horaire ;  charge parfois son portable pour voir les derniers sms qu'il a échangé avec son ex ; le réseau capte mal, ne sait pas s'il en a reçu d'autre depuis ; laisse la batterie diminuer jusqu'à ce qu'il ne s'ouvre plus ; r i n s e  &  r e p e a t