DÉCÈS, FUNÉRAILLES



Capuche relever par-dessus ses boucles sombres, Ander se glisse parmi la foule venue rendre hommage à la vieille madame Bakers. Comme beaucoup, il connaissait la dame et désir lui offrir le respect qui se doit, seulement, il n’a pas envie qu’on le voie ici. Sans doute que ses potes se pointeront aussi dans le gymnase, mais il est venu pour son propre bien. Les murmures comme les conversations bourdonnent autour de lui. Il ne prend aucun mot pour essayer de comprendre ce qui se dit, laissant plutôt son regard détailler le visage souriant de Mrs. Baker qui a été mis en gros sur un chevalet. Jamais plus elle ne sourira ainsi… Tout ça à cause de l’hôpital. Sa gorge se noue le faisant détourner le regard pour plutôt se trouver un endroit pour s’asseoir. Dans sa trajectoire, il bouscule une jeune femme blonde. « S’cuse. » qu’il souffle en lui adressant un sourire poli, alors qu’il ignore que @Jasmine Unique pourrait y voir un fantôme. Il s’avance jusqu’à une fenêtre où il se hisse pour prendre place et observer. Oiseau sur son perchoir comme il aime bien le faire.

DÉCÈS, FUNÉRAILLES



Mrs Baker, paix à son âme et son frêle corps aujourd’hui festoyé d’asticots sous terre, qui s’accompagnait toujours d’une cologne chèvrefeuille et d’un zeste de naphtaline comme toute vieille personne qui se respecte, était une figure de Mariposa.
Probablement déjà là bien avant l’émergence de la ville, elle avait toujours fait partie du paysage. Max se souvenait d’elle, déjà vieille quand lui-même était petit, leur apportant des tartes à la pomme à la maison – elle connaissait fort bien ses grands-parents et ses parents –, les houspillant quand Rory et lui faisaient les cons derrière l’église les fois où ils se rendaient à la messe le dimanche matin, lisant son journal à la table douze du diner tous les mardi matins à sept heures quarante-cinq, quand il lui apportait son café au lait accompagné de sa tranche de banana bread coutumière.
Mrs Baker avait souvent les dents du devant tâchées de son rouge à lèvres carmin désuet, des cheveux qui manquaient un peu à l’arrière, des petites lunettes rondes qui cachaient ses yeux malicieux, et un amour inconditionnel pour les gâteaux mais aussi les fleurs, tant et si bien que Max s’était déjà rendu une fois ou deux avec sa mère à l’hôpital, lui en apporter. Mrs Baker était non seulement une figure de la ville, mais une petite dame pleine de douceur et de tendresse, qui à n’importe quelle heure du jour ou de la soirée, avait toujours un mot gentil pour ceux qu’elle croisait.
Impossible de ne pas se rendre à ses obsèques et au gymnase pour lui offrir un dernier hommage, et quoi de mieux pour célébrer sa mémoire que de contribuer à la collation organisée avec plusieurs banana bread dont elle raffolait ? Cuisinés chez lui une bonne partie de la nuit, et non au diner, souffrant de la panne d’électricité intervenue notamment dans le quartier sud, Max a de grosses cernes violettes sous les yeux, et une crise aiguë de bâillements alors qu’il dispose sur le tréteau du buffet ses gâteaux. Les heures de sommeil manquantes lui causent une maladresse qui ne lui est pas totalement étrangère, et il se maudit dans une flopée de jurons lâchés sous sa barbe lorsque du coude il renverse une bouteille de soda restée ouverte sur les pieds de la personne juste à côté…

DÉCÈS, FUNÉRAILLES



Bien hissé sur sa branche, orbes auscultant la foule, Ander observe le théâtre d’adieu offert à la vieille dame. C’est presque aussi beau que triste. Toutes ces personnes venues pour lui rendre hommage. Il se demande tout de même si tout cela n’arrive pas trop tôt ? Aurait-elle eu quelques années de plus si l’hôpital n’était pas aussi désuet ? L’envie de crier à la foule d’ouvrir leur mirette, de penser plutôt que de se remémorer le sourire de la vieille femme. Bravant les gens agglutiner dans l’hommage, une silhouette arrive jusqu’à lui. Il l’ignore. Passe-temps de quelques temps, l’étau de la peine l’enveloppant pour assombrir son sourire. La blonde l’interpelle, du moins c’est ce qu’on pourrait croire, pourtant, c’est un autre nom qui s’échappe de ses lèvres. « Qui ? » qu’il souffle sans vraiment la regarder. Un battement. Deux. Trois avant qu’il oblique ses prunelles vers elle. Il ne la connait pas, tout du moins son visage ne lui dit rien. Elle semble dans sa tranche d’âge, plus jeune ou du même âge, il ne saurait dire. Ander reste tout de même là à l’observer, penchant la tête légèrement. « Tu fais erreur sur la personne. » Répond-t-il quand même puisque Bastian n’est en rien son patronyme.